La question de la retraite est une question primordiale et transversale dans une négociation de départ, que cela soit dans le cadre d’un protocole d’accord transactionnel post-licenciement, d’une rupture conventionnelle ou de l’acceptation d’un plan de départ volontaire.
Au fil de la négociation, les problématiques et pièges afférents à la retraite se manifesteront ainsi :
Indépendamment de la réforme de l’âge légal de départ à la retraite, il est nécessaire de rappeler ici qu’un Cadre-Dirigeant, ou un Cadre expatrié, ayant un âge compris entre 55 ans et 62 ans (puis 64 ans), sera très certainement sujet à une négociation de sortie avant l’ouverture de ses droits à retraite.
En effet, les entreprises ont tendance, une fois le cap des 55 ans passé, à se défaire des cadres expatriés et cadres dirigeants les plus expérimentés, sous couvert de contrôle ou réduction de la masse salariale.
La sortie des effectifs peut se faire par un licenciement, une rupture conventionnelle, par l’acceptation d’un plan de départ volontaire, doublée éventuellement d’un protocole d’accord transactionnel.
Pour la plus grande majorité de nos clients, la sortie des effectifs se réalise par une négociation transactionnelle.
La question est : pourquoi faut-il faire preuve de précautions au sujet de la retraite lors de la signature d’un protocole d’accord transactionnel ?
Bien souvent négligée, la clause dite de « sauvegarde des droits à la retraite » doit être, dans certains cas, intégrée dans le protocole d’accord transactionnel.
En effet, lors de la signature d’une transaction, tant le cadre dirigeant que l’employeur renoncent à toute action judiciaire postérieure.
Or, que se passe-t-il si, quelques années plus tard, au moment de la liquidation de sa retraite, le Cadre dirigeant se rend compte que son ancien employeur a oublié ou minoré certaines cotisations de retraite ?
La Cour de cassation, par un arrêt en date du 30 mai 2018, n°16-25.426, a admis qu’en présence d’une clause de renonciation à tout recours, clause classique dans le cadre d’une transaction, le salarié ne pouvait, postérieurement à la transaction (5 ans en l’espèce), formuler une demande judiciaire afin de percevoir sa retraite supplémentaire.
La signature du protocole d’accord transactionnel rend irrecevable toute action judiciaire en rectification, sur le fondement de l’autorité de la chose jugée.
Il est donc absolument nécessaire, avant de signer une transaction de :
Il convient dès lors et en amont de toute signature de s’assurer que l’assiette des cotisations retraite a été respectée. Pour ce faire, il convient de reconstituer le salaire objet des cotisations via le nombre de points retraite acquis (notamment pour la retraite Agirc-Arcco).
Plus l’ancienneté du Cadre dirigeant au sein du même groupe sera importante, plus ces vérifications seront primordiales. Ces vérifications sont aussi extrêmement importantes en présence d’une période d’expatriation.
De très nombreux dossiers, notamment dans le domaine du BTP et de la métallurgie, ont mis en évidence des erreurs de cotisations. Le risque augmente très considérablement durant les périodes d’expatriation.
La solution : négocier et inscrire dans le protocole une clause dite de « sauvegarde des droits à la retraite » permettant au Cadre Dirigeant de réaliser une action judiciaire en rectification contre son employeur, malgré la signature du protocole. Cette clause doit être rédigée avec précision afin de préserver les droits du dirigeant.
A défaut, le Cadre dirigeant pourra être confronté à de très mauvaises surprises lors de la liquidation de sa retraite, sans possibilité de faire une action judiciaire pour rectifier sa situation.
La présence de cette clause doit en sus être doublée d’une vérification du sort de la retraite chapeau (article 39) et de la retraite supplémentaire (article 83)
Les retraites chapeaux, dites retraites article 39, et les retraites article 83 ont été modifiées par l’entrée en vigueur de la loi PACTE en 2019.
La retraite chapeau est un modèle de retraite à prestations définies, très souvent limitée aux Cadres Dirigeants, Dirigeants, et/ou membre du COMEX. Cette retraite était conditionnée par une présence du bénéficiaire dans l’entreprise au jour de la prise de sa retraite. En présence d’un départ anticipé, cette retraite pouvait être perdue.
La nouvelle version de la retraite chapeau interdit le conditionnement du versement de ladite retraite à la présence du salarié dans l’entreprise au jour de son départ à la retraite. Les retraites chapeaux existant antérieurement à la loi PACTE ont fait l’objet d’une cristallisation, outre le plafonnement à 5 % de la rémunération annuelle (Instruction interministérielle no DSS/3C/5B/2020/135 du 27 juillet 2020 – https://sante.gouv.fr/fichiers/bo/2020/20-08/ste_20200008_0000_0033.pdf)
La retraite article 83, modèle de retraite à cotisations définies, a été remplacé par le PER obligatoire depuis 2020.
Il est en conséquence primordial de s’arrêter sur les mécanismes de retraite supplémentaire, d’étudier la version en vigueur, afin, le cas échéant, d’adapter la négociation de sortie du COMEX en présence d’une retraite chapeau antérieure à la réforme.
La négociation de sortie peut aussi tenir compte des nécessités du dirigeant, en termes de trimestres cotisés.
Dans une négociation, il existe de nombreux axes permettant de faire en sorte qu’un salarié, proche de l’âge de la retraite, puisse en bénéficier.
Dans un premier temps, il convient de travailler sur la notion de préavis. Dans certains cas, et notamment dans le cas des Cadres dirigeants soumis à la convention collective de la Métallurgie, le préavis peut être de 6 mois.
Il est toujours possible de (i) différer le point de départ du préavis, ou (ii) rallonger le délai du préavis, avec l’accord exprès du dirigeant. Cela peut permettre d’accumuler de précieux mois de cotisation et de se rapprocher de la retraite.
Il est aussi envisageable d’utiliser le compte épargne temps ainsi que les congés payés afin de retarder la sortie des effectifs, dans le cadre d’une solution amiable.
Il faut au demeurant tenir compte du délai de carence pôle emploi (différé d’indemnisation spécifique, différé dit congés payés), lequel permet de valider des trimestres sans cotiser, et dont la durée est d’environ 6 mois. Il faut tenir compte de la durée maximum de perception de l’ARE (aide au retour à l’emploi, l’allocation chômage), soit 27 mois pour un salarié de plus de 55 ans (et 36 mois en présence d’une situation plus délicate du marché du travail, par l’effacement du coefficient 0.75).
Il est aussi parfois préférable de retarder son inscription à Pôle Emploi, tout en respectant le délai de forclusion de 12 mois, afin de retarder le début, et donc la fin, de son chômage, et d’essayer de faire une transition directe avec l’indemnité retraite.
Enfin, un rachat ou une aide au rachat de trimestre peut être envisagé dans le cadre notamment d’un plan de départ volontaire. C’est notamment le cas du Dispositif d’Adéquation des Emplois et des Compétences (DAEC) mis en place par le groupe Peugeot-Citroën (PSA), devenu Stellantis.
Enfin, l’opportunité d’une négociation de départ doit tenir compte aussi de l’âge du dirigeant au jour de la sortie des effectifs, afin d’optimiser une majoration de 30% de son indemnité conventionnelle, et d’éviter, dans la mesure du possible, une minoration de 40%.
Pour bien des raisons, le Cadre Dirigeant devra tenir compte de son âge, notamment pour l’ouverture de ses droits à retraite, pour son indemnité pôle emploi et l’éventuelle dégressivité (57 ans), mais aussi et surtout car la fiscalité n’est pas identique lors d’un départ pour la retraite que lors d’un départ avant l’ouverture des droits.
De surcroit, certaines conventions collectives prévoient des majorations et minorations de l’indemnité conventionnelle de licenciement en fonction de l’âge. C’est notamment le cas de la convention collective des cadres de la métallurgie, en son article 29.
Le cadre dirigeant âgé d’au moins 55 ans et de moins de 60 ans, et disposant d’une ancienneté de 5 ans dans l’entreprise obtiendra une majoration de 30% de son indemnité légale.
Cela peut rapidement représenter une somme équivalente à 100.000 ou 200.000 euros supplémentaires.
A défaut, à partir de 60, une minoration sera mise en place
– 5 %, si l’intéressé est âgé de 61 ans ;
– 10 %, si l’intéressé est âgé de 62 ans ;
– 20 %, si l’intéressé est âgé de 63 ans ;
– 40 %, si l’intéressé est âgé de 64 ans.
En conclusion, une négociation de sortie est traversée du sujet de la retraite. L’anticipation et la projection doivent permettre au Dirigeant de sortir des effectifs avec la certitude d’une retraite protégée, que l’horizon soit à 5,10 ou 15 ans.
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Le Cabinet CHG-Avocat, inscrit au Barreau de Paris, concentre sa pratique sur la négociation en matière de rupture du contrat de travail, que soit par une transaction ou par l’obtention d’une rupture conventionnelle pour les cadres dirigeants et les expatriés . Il a fait de la défense des salariés son objectif premier. Le Cabinet accompagne aussi les Mandataires sociaux en négociation de départ.